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Le jardin de monsieur Dam ou les petits coins de paradis

Le jardin de monsieur Dam

ou les petits coins de paradis


Si vous circulez sur la nationale 41, au milieu de l'isthme de Kra, et ressentez une envie pressante, retenez-vous jusqu'au jardin de M. Dam, à une cinquantaine de kilomètres au sud de Chumphon (juste à mi-chemin entre Bangkok et la frontière malaisienne). Créé en 2001, c’est un lieu aussi cocasse qu’insolite, où les latrines sont érigées en œuvres d'art. Marcel Duchamp [lui] aurait indubitablement accordé sa caution morale et intellectuelle.


L'enseigne est en thaï mais dans le coin, tout le monde connaît. L'endroit est discret, caché, à deux cents mètres de la route.

Ce qui frappe d'abord en arrivant, c'est la végétation luxuriante, opulente, abondante, riche et variée, accueillante et séduisante, apaisante et fascinante. Une verdure contrôlée, maitrisée, régulée mais aussi conquérante, triomphante, éclatante.

Et dans ce cadre époustouflant, des merveilles de «petits coins», là où le roi va tout seul (sur son fauteuil percé), comme on dit révérencieusement. Une véritable déclinaison de vespasiennes. Allez donc à votre rythme, de surprises en découvertes, selon votre humeur, et laissez-vous porter au gré des vagues végétales.

On y suit un parcours quasiment balisé. Les panneaux sont bilingues thaïs-anglais. Les légendes explicatives des différents lieux d'aisance figurent sur des pancartes en forme de couvercles de WC. On est vite sensibilisé au culte rendu dans cet espace: même les poubelles au bord des allées sont en forme de siège de toilettes.

La promenade se déroule dans un labyrinthe enchanteur, constitué d'arbres hallucinants, de bosquets touffus, de cascades de chlorophylle et d’épaisses murailles de feuillaisons.

C’est une sorte de voyage dans la quatrième dimension. Au centre du périple, à peine sorti des entrailles de la terre (évoquées par des grottes reconstituées), un escalier de bois, que dis-je, une envolée de marches ascensionnelles vous amènent sur une passerelle conduisant à des gogues célestes. Il s'agit d'une cabine à sept côtés (y compris la porte) aux vitres fumées. On peut y déféquer avec autour de soi un panorama de 360º, et tout voir sans être vu.

De même, les «feuillées» de Tarzan et Jane, accrochées à la cime des arbres, vous permettent de prendre de la hauteur. Pour les acrobates, une échelle de cordes est même disponible.

Pour la photo souvenir, rendez-vous aux cabinets «Tud Moo» (i.e. fessier de cochon) d’un beau rose porcin et encadrez votre frimousse épanouie dans l’anus en forme de cœur. Cela devrait faire le buzz si vous en ornez votre «mur» sur Facebook (vous avez dit fesse-bouc?).

Faites un détour mémorable par les toilettes troglodytes où une échelle de bambou… métallique vous catapulte sur la terrasse-belvédère. Au moment de quitter le sas d’évacuation (sic) qui n’est rien d’autre qu’une grande cuvette de WC (forcément), un panneau vous interpelle: «DO NOT CLIMB DOWN»! (Ne pas grimper vers le bas). Ben oui, ça ne se fait pas… D’ailleurs, si vous êtes un minimum versés dans la langue de Bill Gates, vous remarquerez que la plupart des indications en anglais sont à la limite du compréhensible, mais cela rajoute au charme de l’endroit.

Les toilettes accessibles aux handicapés ne sont bien sûr pas oubliées,
solidarité intestinale oblige.

 

Au cours de votre déambulation, vous passerez par les toilettes «aux étrons d’or» (Kon Thong), comble du respect indéfectible et hommage révérencieux rendu à nos déjections. Le panneau correspondant à ce «chalet de nécessité» laisse entendre que la texture et la couleur de nos excréments révèle nos pensées intimes. Un «Gnothi seauton» (connais-toi toi-même!) que Socrate n’aurait pas démenti ou renié…

Le poète Théophile Gautier (1811-1872), n’écrivait-il pas (dans sa préface à Mademoiselle de Maupin, 1835) que «L'endroit le plus utile d'une maison, ce sont les latrines»? Et le romantique Alfred de Musset (1810-1857) n’a-t-il point rédigé un guide de bonne conduite propre à la fosse septique? «Vous qui venez ici dans une humble posture, de vos flancs alourdis déposer un fardeau, veuillez, quand vous aurez soulagé la nature et déposé dans l'urne un modeste cadeau, épancher de l'amphore un courant d'onde pure, et, sur l'autel fumant poser en chapiteau, ce couvercle arrondi dont l'austère jointure aux parfums indiscrets doit servir de tombeau».

Autre élément important de ce parc au thème bien particulier, la statuaire y est remarquable. Une multitude de personnages gracieux, souriants et sereins qui peuplent, habitent et enchantent le domaine. On les croise à tous les carrefours et surtout là où on ne les attend pas.

En fin de parcours, il y a, outre le restaurant gastronomique, une grande boutique [ouverte sous un préau] de denrées alimentaires de très bonne qualité, venues exclusivement de la province de Chumphon (labellisées OTOP: One Tambon One Product, l’AOC thaïlandaise) et à des prix très abordables. Il est impossible de repartir les mains vides, vous remplirez certainement votre panier: noix de cajou, pistaches, vin de gingembre, vins de fruits, thés, galettes, sucreries…

Non loin [de là] se trouve le «Cafe» où l'on vend des produits de bouche comme des biscuits, des douceurs et de succulents jus d’orange, mais aussi, entre autres, des services à thé.

Comble du mauvais goût, il y a [même] des théières en forme… d’excrétion colombine.

A l’étage d’un grand pavillon aéré, vous découvrirez la bio du fondateur, monsieur Dam Chingsouwanrot, une «success story» comme on les aime: jusqu’en 1967, avec son épouse et leurs quatre enfants, il vivait dans la ville de Langsuan (qui est aussi le nom de la rivière), dans cette même province de Chumphon. Il travaillait alors comme simple employé de l'usine de glaçons et au moulin à riz, où il ne gagnait que quelques milliers de bahts mensuels. Puis ses rêves et son ambition le poussèrent à se reconvertir dans l'agriculture à plein temps.

Il acheta donc 13 raï et demi de terres agricoles dans le district voisin (appelé Thung Tako). Il y fit pousser la meilleure variété de ramboutan [un fruit proche du litchi] connue [par les botanistes] sous le nom de "Ngo roengrian”, ainsi que d'autres ‘drupes’ afin de compléter ses revenus. En plus de récolter des fruits pour les vendre aux grossistes de Bangkok, il gagnait sa vie en conduisant un minibus, de quoi mettre de l'argent de côté tous les mois en vue de projets plus judicieux.

Et conséquemment, de 1971 à 1981, monsieur Dam agrandit sa plantation de ramboutans jusqu'à 300 raï (1 raï = 1 600 m2) en souscrivant un emprunt à la banque et grâce à ses économies. Il développa ses connaissances en matière de fruiticulture et tenta de perfectionner sa pratique agricole afin d’augmenter la qualité de ses produits pour la vente à l'international.

Mais dans ces années-là, les ramboutans rencontraient de sérieux problèmes dus à la surproduction, au manque de personnel saisonnier et à la difficulté à conserver une marchandise aussi périssable, alors il se mit à cultiver le dourian (roi des fruits et fruits des rois). Grâce à ses recherches infatigables, il réussit même à produire des dourians hors saison, ce qui le rendit célèbre dans toute la Thaïlande.

Or, de 1994 à 1999, les plantations de dourians se multiplièrent dans tout le pays. Ce qui provoqua la chute des prix. Alors, repartant à zéro, il se mit à cultiver des oranges, une variété appelée "Som shokun». Ce qui le rendit encore plus célèbre parmi ses pairs. Mais depuis 2007 jusqu'à présent, les oranges ne sont plus aussi rentables à cause du réchauffement climatique.

Donc, fort de sa grande expérience arboricole, il s'est mis à cultiver différentes espèces, comme le longane (autre fruit voisin du litchi), la papaye, le «keow mangkon» (le fruit-dragon), les pommes etc. afin de remplacer les oranges. Et lorsqu’on admire son inventivité sanitaro-fruitière, on comprend que monsieur Dam n’a pas encore dit son dernier mot!

Raymond vergé

Tapez ‘SUANNAIDUM’ sur Google Earth et vous le trouverez sur le planisphère.
Coordonnées postales: 199 Moo 7, Tako, Ampheu Thung Tako, Chumphon - 86220 Téléphone : 089-652-0734, 077-611-900-1, 077-541-457. Ouvert tous les jours de 7:00 à 18:00. Internet : www.suannaidum.com - http://www.suannaidum.in.th/
E-Mail: suannaidum@yahoo.com

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Juillet 2012

Il y a peu de temps le Qatar déclarait qu'il voulait à Paris un nouveau stade,

avec un toit amovible, pour l'équipe de France de Football.

Voici en exclusivité la première image du projet:

UN TRÈS BEAU STADE POUR UNE ÉQUIPE DE MERDE!



28/06/2012
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